Une réglementation attentive aux opportunités de l'économie circulaire pour le Québec

Dossier spécial – Fabrication circulaire et approvisionnements

Daniel Normandin, CERIEC, conférencier au Forum Excellence industrielle 2022

Par Daniel Normandin, Directeur, CERIEC Centre d’études et de recherches intersectorielles en économie circulaire

Ce n’est plus une nouvelle : un changement profond des modes de production et de consommation est nécessaire pour, entre autres, réduire les émissions de gaz à effet de serre et préserver la fragile biodiversité. Les stratégies de l’économie circulaire ne sont pas en soit révolutionnaires, mais elles n’ont jamais été aussi pertinentes. Elles conjuguent la productivité des ressources (ex. matières, énergie), la qualité, la durabilité et la recyclabilité des produits et des services, la maintenance prédictive, l’amélioration continue et l’internalisation des impacts environnementaux et sociaux.

Parmi la douzaine de stratégies et de pratiques d’affaires sur laquelle repose l’économie circulaire, pour un industriel, l’économie de fonctionnalité et l’écoconception sont deux stratégies particulièrement d’intérêt.

Les autres stratégies de circularisation restent naturellement essentielles, mais :

  • L’écoconception présente l’avantage de faciliter toutes les autres en s’attaquant en aval à la réduction des intrants à la source, en privilégiant les composantes recyclées et revalorisées, en facilitant la réparation du produit et en permettant le démontage du produit en fin de vie pour réutiliser/ recycler/valoriser ses composantes.
  • L’économie de la fonctionnalité permet aux manufacturiers de demeurer propriétaires de leur capital matière et de s’affranchir, en partie, de la volatilité du cours des matières premières, puisque selon cette stratégie, ce n’est pas le produit qui est vendu, mais le service rendu par le produit. Le manufacturier conserve ainsi non seulement un lien avec son client, mais également, avec son produit.

Les leviers et les opportunités du positionnement industriel du Québec

En ce sens, l’écoconception et l’économie de la fonctionnalité sont des leviers pour le positionnement industriel du Québec. Pour leur donner du souffle, certaines normes et réglementations doivent être regardées de plus près.


Sur le terrain, les situations où les occasions de circularité sont contraintes sont multiples. Elles s’étendent de la difficile homologation de plastiques revalorisés à l’encadrement du secteur de construction, en passant par les réticences des entreprises à partager leurs données. Il y a aussi des normes internationales plus ou moins harmonisées et des habitudes à changer, tant du côté des entreprises que des consommateurs.


Dans ce contexte, la gouvernance de l’économie circulaire est déterminante pour pointer les restrictions « inutiles », promouvoir l’innovation collaborative entre toutes les parties prenantes et saisir les opportunités malgré la complexité des cadres réglementaires.

L’ÉCOCONCEPTION est une conception de produits ou de procédés caractérisée par le souci de réduire ou de prévenir les impacts environnementaux tout au long de leur cycle de vie. L’écoconception repose aussi sur l’idée que les produits ou procédés en question doivent avoir une valeur au moins équivalente à celle des produits ou procédés qui ne seraient pas écoconçus. L’écoconception peut être envisagée dans tous les secteurs d’activité, des emballages, aux toits végétaux ou l’intégration de matières recyclées dans la fabrication de produits.

2 ingénieurs discutant écoconception d'un produit
Parmi la douzaine de stratégies et de pratiques d’affaires sur laquelle repose l’économie circulaire, pour un industriel, l’économie de fonctionnalité et l’écoconception sont deux stratégies particulièrement intéressantes.

L’ÉCONOMIE DE LA FONCTIONNALITÉ est un système privilégiant l’usage plutôt que la vente d’un produit. Elle vise à développer des solutions intégrées de biens et services dans une perspective de développement durable. Aussi appelée économie de l’usage ou économie de la performance, l’économie de fonctionnalité privilégie la vente d’une solution intégrée plutôt que la vente d’un bien matériel ou d’un service traditionnel. Elle substitue la valeur d’usage à la valeur de propriété.

Cela implique que le législateur oriente la réglementation vers l’innovation et l’exploitation de gisement de matières secondaires (aussi appelées « gisements urbains »). L’État peut aussi, à travers des partenariats publics privés et ses approvisionnements, faciliter un virage circulaire dans de nombreux domaines (mobilité, équipements informatiques, éclairage public, etc.). La circularisation doit également impliquer le secteur financier qui doit répondre à des besoins d’investissements ne se rentabilisant plus nécessairement sur les volumes, mais plutôt sur la durée et avec des actifs plus intangibles, comme dans les équipements en tant que service ou la fabrication à la demande.


Une des clés pour encourager la participation des PME relève en premier lieu d’une connaissance partagée. J’invite ainsi toutes les PME manufacturières à inspirer leurs projets en visitant le site de Québec circulaire. Elles y trouveront notamment les descriptions des stratégies à leur disposition, des exemples d’initiatives, une boîte à outils ainsi qu’un répertoire d’experts.

Panel approvisionnement et conjoncture mondiale du Forum Excellence industrielle 2022

Visionnez la discussion Gouvernance de l’économie circulaire, animée par Daniel Normandin, directeur, CERIEC, avec :

  • Pierre-Luc Beauchamp, Chef sénior de développement de produits, CCM Hockey
  • Marie Hétu, Gestionnaire du Bureau de transformation organisationnelle, Cook-it
  • Mario Rousseau, Président, Intellinox

Note : Cet article est issu du rapport de la 2e édition du Forum excellence industrielle, qui s’est tenu le 27 octobre 2022, à l’usine Bombardier dans l’arrondissement de Saint-Laurent.